Évolution technologique, sur 4 décennies,
de l’assemblage des sous-ensembles électroniques

Le processus de fabrication.

Pour bien comprendre l’évolution dans l’assemblage des modules, sous-ensembles et produits
finis ou systèmes électroniques , il faut présenter le processus général qui permet d’aller de la matière première, support, composants et pièces mécaniques, vers un sous-ensemble électronique puis un produit ou un système.

 

La matière première
1- Le support d’interconnexion

Il réalise la fonction de support mécanique des différents constituants et permet de réaliser le
lien électrique entre les divers composants. En 1956, ce support est une plaque électriquement isolante (en bakélite par exemple) qui est découpée aux dimensions requises puis, percée, sur laquelle on va insérer des picots cannelés (plots métalliques conducteurs qui vont servir de relais aux fils d’interconnexion) et/ou des œillets (également en matière conductrice permettant de relier les deux faces et de recevoir les queues de composants). Des fils électriques en cuivre servent à l’interconnexion. Ils sont brasés sur les picots et/ou les œillets. La brasure (au fer à souder manuel), la vis ou le rivet permettent la liaison électrique définitive de tous les éléments constitutifs.

Dessin de la réalisation:

On peut se rendre compte des limitations d’un tel assemblage tant en qualité qu’en fiabilité et en coût de réalisation. Très vite, le circuit imprimé remplace cet assemblage. L’interconnexion se fait par des " pistes " de cuivre sur le support. Il est d’abord à une face, puis à deux faces et enfin multicouches (voir le chapitre sur l’atelier de circuits imprimés).

Jusqu’en 1987, la société TRT réalise les supports d’interconnexion jusqu’au circuit imprimé double face, ensuite tous les circuits imprimés seront achetés à l'extérieur.

2- Les composants électroniques

Ils peuvent être achetés, c’est la majorité des cas dès 1956, ou fabriqués :

- composants bobinés (voir le chapitre sur l’atelier de bobinage),
- composants de micro-assemblage hybrides et/ou hyperfréquences (voir chapitre sur l’atelier de micro assemblage).

Les composants achetés sont souvent préparés avant montage. Les types de préparation sont multiples. On peut citer les plus fréquents:


- coupe à longueur,
- cambrage des queues de composants,
- dédorage des connexions à cause de l’incompatibilité de l’or et de l’étain-plomb utilisé pour la brasure,
- préformage,
- et tous les mixages possibles de ces différents types de préparation.

3- Les autres pièces.

Ce sont par exemple des pièces métalliques ou plastiques telles que les faces avant, les raidisseurs de cartes, les équerres support de composants, les radiateurs pour les composants qui dissipent de l’énergie, les torons de câbles, les nappes…

La plupart de ces pièces sont achetées et en particulier toutes les pièces plastiques que TRT n’a jamais fabriquées. D’autres sont fréquemment fabriquées telles que les torons de câbles et les nappes de fils. Certaines pièces métalliques sont réalisées en interne et en particulier les faces avant et les châssis, ces derniers servant de supports d’interconnexion dans la réalisation d’un système électronique constitué de plusieurs sous-ensembles. Ces fabrications de pièces métalliques seront locales jusqu’en 1987 (voir chapitre sur l’atelier de tôlerie/peinture).


L’assemblage
1- Assemblage des constituants sur leur support

Dans les années 50, il n’y a pas de microprocesseurs, pas de transistor, pas de plastique, peu de machines, pas d’assistance par ordinateur, même pas de circuits imprimés ! Et pourtant, en 1956 on fabrique des appareils électroniques. Il y a des supports mécaniques, des câbles, des tubes électroniques et des hommes.

Le processus d’assemblage électronique est alors l’affaire d’opérateurs professionnels expérimentés qui manient la pince, le tournevis et le fer à souder. Il faut picoter, œilleter, braser, visser, sertir, contrôler. Pas d’embauche sans le passage dans une école de câblage pendant plusieurs semaines pour former les nouveaux opérateurs(trices), principalement issus de l’industrie textile, à toutes nos techniques. Ainsi, naissent les différentes platines électroniques qui, assemblées entre elles et reliées par des torons soudés vont constituer les produits TRT.

Ce processus, adapté aux moyens de l’époque, est lourd. Il va subir une multitude d’évolutions. Dans les années 60, le circuit imprimé apparaît. Il est équipé de pistes conductrices sur une seule face. Cette évolution importante permet l’introduction d’équipements de production de série et l’exécution de taches plus simples et plus parcellisées par des opérateurs (trices) moins expérimentés.

Le service " méthodes " définit les processus opératoires et établit les temps d'exécution des différentes tâches. Ces temps servent bien sûr à établir le coût main d’œuvre du produit mais également à moduler la paie de l’opérateur par calcul de la différence entre le temps alloué et le temps réellement passé. C'est l'époque du taylorisme et du " boni " qui permet, en fonction de l’efficacité de l’opérateur, d’ajouter une bonification financière pouvant aller jusqu’à 20% de la paie.

Lorsqu’un élément est inséré sur le circuit, il faut le maintenir, retourner la carte et le braser, ceci plusieurs dizaines voire centaines de fois par carte ce qui entraîne des temps d’exécution dits unitaires très longs. Même si à l’époque les marchés militaires et les marchés PTT sont établis avec un prix fixé par TRT pour une longue durée (souvent des marchés d’une durée supérieure à un an), la notion de rentabilité existe mais n’a pas l’importance qu’elle prendra ensuite, lorsque les marchés deviendront " libres" pour les administrations.

Retourner une seule fois le circuit imprimé s’impose : c’est la naissance des Klapp-mall. Le circuit est posé sur un cadre, les composants sont insérés, puis, un " chapeau ", fait d'une planche de bois recouverte d’une plaque de mousse, est verrouillé sur le cadre pour maintenir les composants lors de l’opération de retournement.

Une autre évidence apparaît : tous les composants doivent être préparés comme cela a été indiqué au paragraphe précédent.

Une amélioration importante voit le jour, à la fin des années 60, avec l’arrivée de la machine à couper et cambrer les connexions sur le circuit. A la fin de l’insertion des composants, une pédale actionnée par l’opérateur (trice) permet de recourber et de couper les connexions sous le support, ce qui assure la tenue des composants jusqu’au brasage. Un système de double grille au pas de 2.54 mm permet par coulissement de couper et plier toutes les connexions dans le même sens. C’est la méthode Krefeld importée du groupe Philips.

L’évolution de la technologie conduit début des années 70 (pour le MIC 1G par exemple) au circuit imprimé double face. Le " cambrage " des composants provoque de plus en plus de courts-circuits avec les pistes adjacentes au fur et à mesure de la densification des circuits imprimés et les règles de développement imposées par cette méthode deviennent intenables.

Les postes manuels avec bacs, machines à couper-cambrer et Klapp-mall sont abandonnés au profit des lignes d’insertion de composants sur grille à couper droit avec un maximum de 6 postes pour permettre l’équilibrage des temps d’insertion par poste. Les composants sont insérés d’un côté du circuit imprimé appelé " coté composants " et nous brasons de l’autre côté appelé " côté brasure ". Les lignes d’insertion sont constituées par des rails métalliques qui supportent une grille, plaque métallique percée de tous les trous correspondant aux composants à insérer. Le circuit imprimé est posé dessus et les opératrices insèrent un nombre de composants équivalent au sixième du temps de pose de tous les composants ; c’est un facteur primordial dans l’organisation de l’atelier afin d’éviter les temps d’attente. Derrière les rails d’insertion, les composants à insérer sont présentés dans des distributeurs rotatifs, ou Échelle de Jacob, comportant 12 balancelles de 8 compartiments soient 96 augets de composants maximum. Nous noterons dans ce paragraphe que certains termes rappellent l’origine Philips de ces processus. En effet ils sont issus du vocabulaire hollandais à culture religieuse protestante. Le klapp-mall est le petit claquoir en bois utilisé pendant les offices religieux pour rythmer la cérémonie. Les distributeurs de composants " Échelles de Jacob " rappellent la Bible.

Pour augmenter la densité, les composants axiaux sont insérés debout et maintenus l'un près de l'autre perpendiculairement au circuit imprimé. Un composant spécifique appelé " triafold " permet de réaliser cette fonction et évite les courts-circuits entre composants.


L’ensemble composants, circuit imprimé et grille est " thermoformé " c’est à dire enveloppé dans un film plastique qui épouse la forme des composants grâce à une élévation de température et une aspiration du film. Heureusement qu’à cette époque les charges électrostatiques n’ont pas d’incidence sur la fiabilité des composants électroniques !

Cette opération est immédiatement suivie d’une opération de coupe des connexions sur la Machine à couper droit qui, équipée d’une lame affûtée poussée par un vérin, cisaille toutes les connexions qui dépassent sous la grille. C’est l’épaisseur de la grille, 1.5 mm, qui détermine la longueur des connexions sous le circuit imprimé. La grille est développée et réalisée par le service Méthodes-Outillage.

Les distributeurs de composants rotatifs laissent place aux machines d'aide à l'insertion. Un point lumineux indique l'emplacement du composant sur le circuit imprimé et même sa polarisation quand c’est nécessaire, grâce à une surbrillance. D'abord les Royonic, puis les Logpoint avec une programmation des coordonnées du composant d’abord sur le poste de travail puis hors du poste grâce à l'arrivée de l'ordinateur et du traitement direct des informations en provenance des services de développement.

L'objectif est de remplacer progressivement l’insertion manuelle par de l'insertion automatique. Une machine de pose des composants axiaux Dyna Pert est investie en 1975.Il s'agit en fait de deux machines ; un séquenceur sur lequel est créée une bande de composants spécifique à la carte à fabriquer et une machine de pose qui utilise cette bande spécifique ; elle insère 3000 composants à l’heure. Grâce à elle le MIC 1G est produit dans les meilleures conditions.

Les circuits intégrés arrivent à la même époque en production. Ils sont rangés dans la catégorie des composants radiaux qui sont tous insérés à la main. Une tentative d’automatisation est envisagée avec l’acquisition du Robot d’insertion Olivetti en 1981. C’est un robot initialement conçu pour la fabrication des machines à écrire Olivetti. Les formes des condensateurs, bobinages ou relais sont trop imprécises et ne permettent que de maigres progrès. En 1984 une machine Universal insère les circuits intégrés DIP (Dual Inline Package) en grande quantité à la cadence de 1500 composants à heure.

Toutes ces évolutions imposent des contraintes de développement des produits qui sont regroupées dans les " règles d’implantation " définies en commun par les études/développements au Plessis Robinson et le centre industriel de Rouen.


Au début des années 80, l’arrivée des CMS (Composants Montés en Surface) sur les circuits imprimés est une nouvelle révolution pour l’industrie électronique, mais ce n’est pas une découverte pour l’usine de Rouen. En effet, une longue expérience de leur évolution et de leur utilisation en micro-assemblage hybride a permis d’avancer très rapidement dans cette technologie. L’équipement de pose est déjà présent dans l’atelier de micro-assemblage avec la Machine Zévatech. C’est une machine suisse capable de poser 1500 composants à l’heure avec une grande précision. Dans une première étape les sous-ensembles électroniques sont assemblés dans l’atelier de micro-assemblage.

A cause des volumes qui augmentent et des temps de manutention qui deviennent insupportables, l’implantation de la machine dans l’atelier d’assemblage devient une nécessité. La Machine Zévatech est équipée, à cette même époque, d’un deuxième module qui permet de porter sa cadence à 3000 composants à heure. Ce sont alors les microcircuits hybrides qui font la navette entre les deux ateliers. Les premières cartes ne comportent des CMS que sur une seule face, " le coté brasure ". Les composants traditionnels sont sur l’autre face, " le coté composants ". L’innovation réside dans le maintien des CMS par collage jusqu’au brasage. Et, comme à chaque introduction d’une nouvelle technologie en production, les problèmes arrivent : viscosité des colles, conservation des colles, maîtrise de la dimension des dépôts de colles, adhérence de la colle sur le verre époxy, définition des règles d’implantation pour les points de colles et des plages de brasage des connexions, invention des " voleurs de brasure " c'est-à-dire de plages plus larges sur le circuit imprimé et qui n’ont pas d’autre fonction que de récupérer les excès de soudure lors du brasage…

L’évolution du nombre de composants CMS et la diminution de l’utilisation des composants traditionnels nécessitent l’implantation des CMS sur les deux faces du circuit imprimé. La technique du reflow, refusion de crème à braser sérigraphiée, déjà utilisée en micro-assemblage est adoptée pour l’assemblage sur circuits imprimés.

On augmente encore la capacité de la ligne Zévatech avec un troisième module. Puis, c’est l’arrivée des lignes de pose Fuji et des fours de refusion Thermatec, d’abord aux infra rouges puis par convection. De nouveaux problèmes se posent alors: hygrométrie des circuits imprimés qui dégazent au passage au four, " zone d’ombre " des composants traditionnels qui empêchent la montée de température jusqu’au pic de brasage des gros composants… Certaines cartes ont le " privilège " de cumuler tous les problèmes !

En plus des contraintes techniques, l’atelier d’assemblage doit aussi prendre en compte les contraintes commerciales. Les commerçants demandent de réduire le délai entre la prise de commande et la livraison. Ce critère devient une préoccupation primordiale et la diminution du TPT (ThroughPut Time ou temps de traversée) un souci quotidien. Pour satisfaire cet objectif, les équipements sont rassemblés dans un pôle d’insertion automatique.

Les machines d’insertion des composants axiaux Dyna Pert, et radiaux Olivetti et Universal, les machines de pose des plots Loupot et Berg, les machines de pose des CMS Zevatech, puis Fuji sont rassemblées autour d’un convoyeur en boucle, le convoyeur Philips VTS.

 

 

Les deux machines d’insertion des plots sont elles-mêmes servies par un Robot 5 axes Puma fabriqué par la société Staubli.
- Les plots " Loupot " sont utilisés pour relier deux points avec un composant ajustable.
- Les plots " Berg " sont utilisés pour réaliser des configurations clients avec des cavaliers.

La généralisation de l’utilisation des CMS finit par faire disparaître les composants traditionnels. Une simplification du processus d’assemblage devient nécessaire avec la suppression des composants collés sur la face brasure, le collage étant une opération délicate. Il ne reste plus qu’une opération de refusion qui est beaucoup mieux maîtrisée.

Les CMS évoluent pour s’adapter à tous les produits électroniques qu’ils soient grand public ou professionnel:

- Les " chips ", boîtiers parallélépipédiques qui constituent la majorité des résistances et des condensateurs de faible valeur, voient leurs dimensions passer du 1206* (3mmx1.5mm) au 0805, au 0603 et au 0402. En 2003 on commence même à parler du 0201 c’est à dire 0.5mmx0.25mm !
* Les 2 premiers caractères sont la longueur du boîtier en centièmes de pouce, les 2 suivants, la largeur.
- Les circuits intégrés voient leur boîtier évoluer en fonction du nombre d’entrées/sorties nécessaires. Les SO 8 (Small Outline à 8 connexions), SO14, SO16, SO28 (28 connexions) pour les plus courants en allant vers les TSOP (Thin Small Outline Package) fréquemment utilisés pour les mémoires, les QFP (Quad Flat Pack) pour les fonctions électroniques intégrées plus complexes avec des connexions sur les 4 côtés du boîtier et les BGA (Ball Grid Array) avec les Entrées/Sorties par des billes de brasure situées sous le boîtier. Le nombre de connexions dépassera rapidement 300 !
- D’autres boîtiers " exotiques " voient le jour pour le montage en surface des composants aussi divers que les bobinages, les relais, les connecteurs ou les transistors de puissance.

 

 

 

 


 

 

La diminution, voire la disparition dans certains développements, des composants traditionnels et le besoin d’augmentation des cadences de pose pour les produits de grande diffusion tels que le DECT (raccordement sans fil des abonnés au téléphone), amène un bouleversement des organisations des ateliers.

- Le pôle d’insertion automatique " explose ". Le convoyeur et toutes les machines d’insertion sont supprimés ; certaines machines sont revendues à des sous-traitants locaux.
- Les opérations d’insertion, lorsqu’elles restent nécessaires sont à nouveau faites à la main.
- Les Lignes de pose passent à 2 puis 3 et même 4 :

. Une est spécialisée pour les petites séries et les prototypes avec les équipements QUAD AVX 500
. Une autre est spécialisée pour le DECT avec les machines les plus rapides et les plus précises :
• Dépôt de crème à braser sur MPM
• Pose des chips avec la CP6(40 000 chips à l' heure en cadence brute)
• Pose des circuits intégrés et des composants exotiques à l’aide d’une machine GSM2 d’Universal (de 1000 à 2000 composants à l’heure en fonction des boîtiers)
• Un four Thermatec pour la refusion




Les deux autres sont équipées de :

• modules GL2 pour le dépôt des points de colle,
• machine Fuji GSP3pour la sérigraphie de crème à braser,
• modules CP3 et/ou CP4 pour les chips,
• IP2 pour les circuits intégrés " basiques ",
• GSM2 pour les circuits intégrés complexes et les boîtiers exotiques
• four Thermatec à double usage, polymérisation de la colle ou refusion de la crème à braser en fonction de la technologie utilisée.

 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Certaines cartes passent deux fois sur la ligne : une fois par face et par technologie d’assemblage.
C’est aussi l’époque de l’introduction de nouveaux concepts d’organisation d’atelier tel que le TPM (Total Productive Maintenance) ; c'est l’implication du personnel dans la mesure et l’évolution des indicateurs de suivi du fonctionnement et des performances de l’atelier.

Toutes ces modifications permettent de réduire les TPT (Throughtput time = Temps de traversée) qui passent à 2 jours pour l’atelier d’insertion automatique et 5 jours pour la totalité de l’assemblage ; ceci permet de livrer une carte câblée à l’atelier de test dans un temps record !

Il ne faut pas oublier que les produits fabriqués concernent l’électronique professionnelle ! Si ces chiffres peuvent encore paraître longs à ceux qui ont côtoyé l’industrie électronique grand public, ils correspondent quand même à une division par 4 du temps de traversée à l’usine de Rouen en 5 ans.

2- Interconnexion électrique

Cela concerne le raccordement physique des composants avec leur support soit par brasage soit par fils.

2.1 Le brasage

Dans les années 50, l’interconnexion électrique est réalisée à l’aide du fer à souder. Le brasage est manuel. Il faut une formation d’une quinzaine de jours à un opérateur pour savoir réaliser une bonne brasure ; c’est un joint parfait qui montre que les deux pièces à braser sont à la même température (température de fusion de l’étain/Plomb (Sn/Pb), environ 200°C). En dessous, il y a risque de " brasure sèche ou crotte de nez dans notre jargon " ; c’est à dire qu’une oxydation peut se former et entraîner une rupture de la continuité électrique à terme. Au-dessus, il y a risque de détérioration des composants assemblés par surchauffe.

Ce brasage manuel est long, fastidieux pour l’opérateur et source de problèmes de qualité à court et à long terme. Imaginez-vous à la place de l’opérateur (trice) qui pendant 8 heures réalise des brasures manuelles, le manque de concentration est probable !
Cette méthode est très artisanale. L’introduction des machines à braser, pratiquement simultanément à l’arrivée des circuits imprimés comme support d’interconnexion, va révolutionner ce secteur.

Cette machine génère une vague d’étain-plomb liquide à environ 240 °C qui effleure la carte quand elle passe, permettant ainsi de déposer les points de brasure là où il faut !
Fin des années 60, le bain d’étain-plomb est recouvert d’huile de palme. Cette huile sert à éviter l’oxydation du bain de métal en fusion et la formation de scories (résidus de soudure brulée) qui entraînent des courts circuits sur le circuit imprimé et provoquent des pertes de métal. En outre, il faut nettoyer régulièrement les canalisations d’extraction des fumées encombrées par les résidus de vapeur d’huile qui menacent de s’enflammer. C’est le début de la maintenance préventive, même si à cette époque on n’en parle pas encore.

Pour améliorer la soudabilité appelée aussi "mouillabilité", l'apport de décapant est nécessaire. C’est la fonction assurée par " le flux " (agent acide de type colophane dilué avec de l’alcool) ; il permet le décapage des connexions et interconnexions. Un fluxeur à mousse injecte le flux sous pression à travers un cylindre de pierre poreuse. Le flux est activé par une montée en température assuré par des lampes à infrarouge.

L’introduction en atelier de nouvelles machines ne se fait pas sans amener son lot d’inconvénients. Certes, le brasage à la vague est plus rapide, les brasures de meilleure qualité mais tous les composants ne peuvent pas passer sur le bain à cause :

- de la température non supportée par le composant et/ou de son étanchéité
- des connexions dorées ou en nickel-chrome qui doivent être traitées auparavant pour ne pas polluer le bain d’étain-plomb de la vague.
- des condensateurs qu’il faut préparer avec un pied de levage, perles ou cambrage
" Style Louis XV ", car l’enrobage empêche la remontée de brasure dans les trous métallisés et le nettoyage correct de la carte soudée.

 

 


Suite au brasage à la vague, des résidus chimiques restent sur le circuit imprimé ; il faut les éliminer. Le nettoyage est d’abord fait à la main à l’aide d’un pinceau à poil plastique dur et court trempé dans un bain de flugène. Là non plus, il n’était pas encore question des charges électrostatiques ! L’opération est réalisée sous hotte ventilée pour la protection de l’opérateur (trice).

Vers 1980 le nettoyage après brasure s’automatise avec l’introduction de la machine à ultrasons et phase vapeur au solvant flugène 113E et de son automate de manutention en paniers. Elle met fin à la période de nettoyage manuel mais les risques pour l'environnement subsistent, à cause de l'extraction des vapeurs par le toit et de leur rejet dans l’atmosphère.
L'utilisation du flugène est finalement interdite. Le lavage à l'eau est envisagé mais il pose aussi des problèmes ; en particulier à cause du séchage qui nécessite beaucoup d’énergie calorifique et génère donc un coût prohibitif.

La vague et les solvants de nettoyage évoluent. Les 2 machines (vague + nettoyage), d’abord séparées, sont ensuite reliées par un convoyeur à chaînes. Les circuits imprimés câblés passent de la machine à braser à la station de lavage. Des balancelles programmables servent de chariots de transport. Elles pilotent, par l’intermédiaire d’un automate, les différents paramètres de la vague (hauteur, température, vitesse de passage) ainsi que l’entrée/sortie du poste d'insertion et du poste de retouche.

Peu à peu la maîtrise des équipements et l’évolution technologique des flux, des alliages, des composants, des circuits imprimés permettent de supprimer le nettoyage. Mais des résidus restent sur le circuit. Il s’agit d’une pellicule type " vernis chimiquement neutre ". C’est un grand tournant dans la façon de voir la qualité. Il faut admettre que les cartes ne sont plus visuellement impeccables ; les critères de qualité qui reposaient jusqu’à présent sur le visuel sont petit à petit abandonnés au profit de la mesure de la fonction réalisée. On se rapproche du " Grand Public ".

Ceci aura des conséquences sur les interfaces de test qui vont devenir très sophistiquées. Il faut augmenter le nombre de points de test et percer le vernis résiduel avec des pointes en forme de " trépans " pour assurer un bon contact électrique.

L'arrivée d'une vague sous azote au début des années 90 a pour avantage d'éviter la formation des scories et d'avoir des brasures de très bonne qualité. Le " cracker " d'azote fait désormais partie de notre environnement. C’est là que la société " Air Liquide " vient faire le plein d’azote liquide qui, après détente, est distribuée dans les ateliers.

Les CMS vont encore une fois modifier la technologie de brasage avec des systèmes " double vague ". En effet, la brasure simultanée des CMS et des composants traditionnels est très difficile à cause des effets d’ombre. On voit alors apparaître sur le marché des machines à braser double vague constituées par une première vague " agitée " qui permet de projeter la brasure sur toutes les surfaces recouvertes d’étain/Plomb et d’une deuxième vague " lisse " qui enlève tous les excès de brasure apportés par la première. Par cette technique, on retrouve la qualité de brasure obtenue avant les CMS. Ces équipements double vague seront entièrement sous azote dans un premier temps puis partiellement inertés, c'est-à-dire sous azote uniquement au niveau des pots de brasure étain-plomb.

L’évolution des assemblages de cartes vers le tout CMS tend à faire disparaître ce type de brasure au profit de la refusion de la crème à braser. Puisqu’il ne reste que quelques points de brasure à faire, ces derniers peuvent très bien être faits à la main, la mise en œuvre des équipements de brasage à la vague étant trop coûteuse ; dans le taux horaire de l’insertion manuelle, l’amortissement de la vague vient en deuxième position, derrière le salaire de l’opérateur !

2.2 Le raccordement par fils

Ce chapitre sur l’interconnexion ne serait pas complet si on ne parlait pas des interconnexions faites dans les châssis qui sont les supports des produits électroniques complexes et des systèmes.

Le raccordement des sous-ensembles se fait d’abord avec des torons réalisés sur des planches avec des clous pour positionner les fils et réaliser un cheminement précis. Le raccordement peut également se réaliser par des nappes.

Puis, les interconnexions se font petit à petit à l’aide du wrapping. Cette technique consiste à réaliser un enroulement sur une connexion (4 tours max) puis, d’emmener ce même fil sur une deuxième connexion où l’on réalise également un enroulement. La continuité électrique est ainsi réalisée. Le wrapping peut être manuel ou aidé par un pistolet avec une liste de cheminement. Très vite, il devient assisté, à partir de bandes perforées, permettant de prendre le fil de bonne longueur dans un " magasin " placé sur le poste et de déplacer une table en X-Y de façon à amener la connexion en face de l’embout du pistolet. La commande par bandes perforées sera progressivement abandonnée au profit de l’ordinateur. Le poste deviendra même entièrement automatique, début 2000, après la récupération de machines en provenance de Viasystems - Boldon en Grande Bretagne. L’opérateur (trice) n’a plus qu’à piloter la machine qui réalise tous les wrapping automatiquement.

Les connecteurs à wrapper sont à 2 ou 3 enroulements suivant les besoins. Le wrapping étant forcément réalisé après brasure, on réalise la brasure sur une vague spéciale. La vague Electrovert Delta dite " vague profonde " va permettre le brasage de ces connecteurs. Les produits les plus représentatifs du wrapping sont le MIC 1G sans circuit imprimé puis avec un circuit imprimé de fond de panier (appelé carte mère) la famille des IRT, MIC2G et MDX.

Notons que, même lorsque le fond panier est un circuit imprimé, le wrapping peut rester nécessaire pour des interconnexions particulières ou des configurations spécifiques à un client.

Ces opérations restent néanmoins délicates et avec le temps les interconnexions deviennent de plus en plus nombreuses sur les fonds de panier. La carte mère peut atteindre 40 couches et des milliers de points de raccordement sur des surfaces approchant le demi-m². Alors, les connecteurs insérés sur les cartes mères puis brasés sont progressivement remplacés par des connecteurs " CIF " (Connecteurs Insérés à Force), une technologie issue de l’aéronautique à laquelle les autres industriels ont été longtemps réticents. Cette technologie ne demande pas de brasage mais une presse hydraulique de 12 tonnes pour l'insertion des connecteurs telle que la Presse ASG maintenue par Tyco.

3- Retouches et Finitions
3.1 La retouche

Dans les années 50 et 60, la retouche n’a pas une dénomination spécifique dans le processus de fabrication ; l'opérateur exécute son travail, réalise son propre contrôle, " il maîtrise son sujet ", c'est la conscience professionnelle de chacun.
La complexité des cartes augmente. Pour avoir une meilleure efficacité une opération spécifique s'impose dans le processus, elle consiste à vérifier la bonne réalisation des opérations à savoir: respect des fiches d'instruction, mise en place de tous les éléments, analyse des joints de brasage, réalisation correcte des assemblages mécaniques, vérification de la propreté et exécution du travail suivant nos normes.
Les opérations de retouche sont séquencées pour les cartes complexes et également pour des raisons d'équilibrage de temps sur des chaînes de fabrication en ligne.
Cette opération demande des opérateurs expérimentés, connaissance de nos critères de qualité, analyse, rapidité, décision, précision dans l’exécution du travail. Elle est, à cause de tous ces facteurs difficiles à évaluer, un sujet éternel de discussion entre le service méthodes et les ateliers.

D'abord réalisée sans documents elle devient une source d'informations précieuses.

- Pour le câblage manuel: le relevé des anomalies permet à la fois d'améliorer les opérations " amont " et de former les personnes afin de progresser
- Pour les machines automatiques de pose ou d'insertion les relevés d'anomalies permettent de voir en temps réel la dérive en performance de celles-ci et d'apporter des mesures correctives afin de retrouver un niveau de qualité satisfaisant. C'est le concept de l’amélioration continue.





Cette opération est une source inépuisable d'observations qui sert de support à l'amélioration de l'implantation des composants avec l'aide des services de développement et au calcul de rentabilité pour l'achat d'investissement nouveau surtout au niveau de la vague. Tous ces relevés nous permettent d'élaborer des indicateurs en PPM (partie par millions), de définir des niveaux de qualité et des objectifs chiffrés utilisés pour apprécier les performances du groupe de travail chargé de réaliser l’opération.Ces améliorations permanentes aboutissent à envisager la réalisation de cette opération par prélèvement et plus tard la suppression pure et simple sur des produits bien ciblés.

3.2 La finition

Elle consiste en un premier temps à monter les composants qui ne passent pas à la vague mais qui sont indispensables au test et en second à réaliser une mise en configuration de la carte pour le test de conformité. Ces composants peuvent être un interrupteur non étanche, une face avant, un raidisseur, un radiateur. La mise en configuration est réalisée par des cavaliers sur les plots, l'ouverture et la fermeture d'interrupteur, la fermeture de strap/chevron. Certaines finitions peuvent être effectuées après le test de conformité lorsqu’elles ne sont pas nécessaires à cette étape mais obligatoire pour le test fonctionnel et le test système.

On peut résumer ces étapes de retouches/finitions en disant qu’elles n’ont pas eu une grande évolution technologique au niveau du processus. Le but commun recherché entre les services développements, ingénierie et ateliers étant de les diminuer, voire de les supprimer !

 

L’équipe de ROUEN,
et en particulier
Jacky BERQUEZ, Christian HIS et Jean-Claude LEFEBVRE